Accueil professionnels>Difficultés financières>2- Réagir aux premières difficultés>Recouvrement judiciaire : injonction de payer en France et en Europe

Vérifié le 27 novembre 2024 - Direction de l'information légale et administrative (Premier ministre)

Une entreprise doit réagir rapidement pour obtenir le paiement de ses impayés. En cas d'échec du recouvrement amiable (relance par téléphone, mise en demeure), elle peut déposer une injonction de payer devant le tribunal (de commerce ou judiciaire). Lorsque le

débiteurPersonne tenue envers une autre d'exécuter une obligation (qui peut être le versement d'une somme d'argent)
est domicilié dans un autre État de l'
Union européenne (UE)Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Chypre, Croatie, Danemark, Espagne, Estonie, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Irlande, Italie, Lituanie, Lettonie, Luxembourg, Malte, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République tchèque, Roumanie, Slovaquie, Slovénie, Suède
, (à l'exception du Danemark), la procédure d'injonction de payer européenne peut être utilisée.

La procédure d'injonction de payer peut être utilisée par le créancier pour forcer un débiteur à procéder au paiement de sa ou ses dettes.

Elle peut être engagée, quel que soit le montant de la créance, dans l'un des cas suivants :

  • La
    créanceDroit permettant à une personne d'exiger quelque chose d'une autre personne, en général le paiement d'une somme d'argent. Terme souvent utilisé pour désigner la somme due.
    est issue d'un contrat. Le montant de la dette doit être inscrite sur le contrat. Il s'agit par exemple d'un achat auprès d'un commerçant, d'un emprunt, d'une facture impayée, d'un découvert bancaire, d'une reconnaissance de dette, d'un loyer impayé, d'une
    cautionEngagement à rembourser une dette (loyer, échéance de prêt...) à la place du débiteur si celui-ci ne la paie pas
    .
  • La créance est issue d'une obligation à caractère statutaire. Il s'agit par exemple des créances dues aux organismes sociaux, aux ordres professionnels, ou encore des cotisations Urssaf.
  • La créance est issue d'un
    acte de commerceAction d'acheter et de revendre
    . Cela peut être une
    lettre de changeDocument écrit par lequel une entreprise désignée comme « tireur » ordonne à un client professionnel, appelé « tiré », de le payer ou de payer un tiers (par exemple, un établissement de crédit) à une date prévue.
    , un
    billet à ordreReconnaissance de dette émise et signée par un débiteur s'engageant à payer un certain montant à une échéance donnée
    , une cession de créance professionnelle .

Attention

La créance ne doit pas être . Elle doit être certaine, liquide et exigible, c'est-à-dire qu'elle ne peut pas raisonnablement être contestée par le débiteur. Elle doit être arrivée à échéance et son montant doit être déterminé.

Le

créancierPersonne à qui l'on doit de l'argent ou la fourniture d'une prestation
doit saisir le tribunal de commerce ou le tribunal judiciaire  du lieu où se trouve le débiteur :

    Le tribunal de commerce est compétent dans les situations suivantes :

    • Lorsque le créancier et le débiteur sont tous les deux commerçants. Par exemple, le
      débiteurPersonne tenue envers une autre d'exécuter une obligation (qui peut être le versement d'une somme d'argent)
      n'a pas payé une facture suite à une vente de marchandises.
    • Dans un bail commercial, lorsque le propriétaire adresse une demande en paiement contre le locataire.
    • Lorsque la créance résulte d'un acte de commerce (
      lettre de changeDocument écrit par lequel une entreprise désignée comme « tireur » ordonne à un client professionnel, appelé « tiré », de le payer ou de payer un tiers (par exemple, un établissement de crédit) à une date prévue.
      ,
      bordereau DaillyCession de créances professionnelles (factures, honoraires, etc. ) ainsi que de leurs garanties à un établissement de crédit. En contrepartie, le créancier reçoit de la banque le montant de ces créances sous forme d'avance.
      ).
  • Le tribunal judiciaire est compétent dans les autres cas : lorsque le débiteur est un particulier ou exerce une profession libérale par exemple.
Demande auprès du tribunal de commerce
Demande auprès du tribunal judiciaire

À noter

Le recours à un avocat n'est pas obligatoire. Cependant, le créancier peut décider de charger un avocat, un commissaire de justice (ancien huissier de justice) ou un mandataire de déposer la la requête.

Il n'y a pas d'audience devant le tribunal et la procédure n'est pas , c'est-à-dire que le juge prend une décision en fonction des seuls éléments produits par le créancier, sans entendre les arguments du débiteur.

Le président du tribunal examine les documents produits pour apprécier si la demande lui paraît fondée (en tout ou partie), ou s'il doit la rejeter.

Lorsque le juge reçoit la requête en injonction de payer, il a 3 possibilités :

  • Rejeter la demande. Le créancier ne dispose d'aucun recours. Il ne peut pas faire appel, mais il peut engager une procédure judiciaire d'assignement en paiement.
  • Accepter la demande. Le juge rend une ordonnance d'injonction de payer. Le greffe remet au créancier une copie certifiée conforme de la requête et une copie de l'ordonnance d'injonction de payer comportant la 
    formule exécutoireExpression apposée sur les décisions de justice ou sur les actes authentiques établis par les notaires. Elle leur donne le droit d'être appliqué par tous les moyens de droit et si nécessaire par l'aide des officiers de la force publique (police et gendarmerie).
    .
  • Estimer que la requête est partiellement fondée. Le juge prononce alors une injonction de payer pour une partie seulement de la somme demandée. Par exemple, un créancier a demandé une injonction de payer à hauteur de 7 000 € mais rend une ordonnance à hauteur de 4 000 €. Le créancier peut alors :

    • soit renoncer à la procédure d'injonction de payer. Il peut décider d'engager une procédure judiciaire classique.
    • soit poursuivre l'exécution de l'ordonnance mais sans pouvoir alors engager une autre procédure pour recouvrer les 3 000 € restants

Pour que l'ordonnance soit exécutée, le créancier doit la faire

signifierActe par lequel une partie informe son adversaire d'un acte ou d'une décision de justice par l'intermédiaire d'un commissaire de justice (anciennement huissier de justice et commissaire-priseur judiciaire)
par un commissaire de justice.

La signification doit être faite dans un délai de 6 mois à partir de la date de l'ordonnance. Si elle n'est pas signifiée dans ce délai, l'ordonnance est caduque ((c'est-à-dire annulée).

L'acte de signification comprend les informations suivantes :

  • Sommation de payer le montant de la somme indiquée par l'ordonnance, les intérêts et frais de greffe
  • Possibilité pour le débiteur de contester l'ordonnance dans le délai d'un mois à partir de la signification de l'ordonnance. Le débiteur est averti qu'à défaut d'opposition, il ne pourra plus exercer aucun recours.
  • Avertissement au débiteur qu'il peut prendre connaissance des justificatifs fournis par le créancier au greffe. Les justificatifs fournis par le créancier sont également accessibles via la plateforme Mespièces.fr. Si ces documents ne peuvent pas être mis à disposition sur la plateforme, ils doivent être joints à la requête lors de sa signification.

Mespieces.fr

Si l'ordonnance signifiée n'est pas contestée par le débiteur, elle devient alors un

titre exécutoireCopie d'une décision de justice ou d'un acte rédigé par un notaire sur lequel une formule exécutoire est écrite. Cette formule est un ordre donné aux forces de police ou à la gendarmerie pour aider un commissaire de justice (anciennement huissier de justice et commissaire-priseur judiciaire) à exécuter la décision figurant dans le document.
. Elle produit les effets d'un jugement définitif, c'est-à-dire non susceptible d'appel. Le créancier est ainsi autorisé à procéder à des mesures d'
exécution forcéeProcédure légale utilisée pour obliger quelqu'un à appliquer un jugement ou à respecter ses engagements
(par exemple une saisie) en cas de non-paiement de sa créance.

À savoir

La signification de l'ordonnance d'injonction de payer entraîne des frais de commissaire de justice qui sont payés par le créancier.

Le débiteur peut contester l'injonction de payer. Pour cela, il doit faire opposition (en remplissant un formulaire spécifique) dans un délai de 1 mois à compter de la

significationActe de notification officielle d'une partie à une autre
de l'ordonnance d'injonction de payer.

S'il fait opposition, il n'a pas à exécuter l'ordonnance, c'est-à-dire à payer la somme réclamée : on dit que l'opposition est suspensive.

L'opposition doit être effectuée devant le tribunal qui a rendu l'ordonnance d'injonction de payer : soit le tribunal de commerce, soit le tribunal judiciaire.

Opposition devant le tribunal de commerce
Opposition devant le tribunal judiciaire

Lorsque le débiteur a fait opposition à l’ordonnance d’injonction de payer, le greffier convoque le créancier et le débiteur à l’audience du tribunal. La procédure devient

contradictoireDébat où chaque partie est en mesure d'exposer son point de vue et de discuter des preuves, faits, arguments liés à l'affaire concernée
 : le juge entend donc les arguments de chacune des parties, du débiteur et du créancier. Il examine les pièces qui lui sont remises et pose les questions qu’il estime utiles.

Le créancier doit être présent à l'audience ou être représenté par un avocat. La présence de l'avocat n'est pas obligatoire sauf lorsque le litige porte sur une somme supérieure à 10 000 €.

Le tribunal rend ensuite un jugement qui remplace l'ordonnance d'injonction de payer.

À savoir

Si aucune des parties ne se présente à l’audience, l’instance est éteinte et l’ordonnance d’injonction de payer devient caduque.